Interview : conseiller en prévention, l'appui technique de l'entreprise

Depuis un an, Lucie Deuze exerce le métier de conseillère en prévention au sein du service de santé au travail interentreprises GMSI 84. Son rôle principal : transmettre les bonnes pratiques de prévention des risques professionnels auprès des entreprises. La tâche est passionnante et le défi important, surtout auprès des TPE et PME qui n'ont pas toujours le temps de saisir tous les enjeux de la prévention et son impact positif sur l'économie d'une entreprise. Il faut oeuvrer sur le long terme pour faire passer le discours et comme le constate Lucie Deuze, la persévérance et la communication sont les meilleurs atouts du conseiller en prévention.

Comment êtes-vous devenue conseillère en prévention ? 

Pendant quatorze ans, j'ai travaillé comme assistante médicale et assistante de l'équipe pluridisciplinaire. Puis j'ai suivi une formation avec l'AFOMETRA, pour obtenir une certification professionnelle. Et depuis un an, je suis conseillère en prévention.

Quelles qualités sont, selon vous, nécessaires pour exercer ce métier ?

Il faut être autonome, savoir s'organiser et surtout être dynamique pour accrocher les employeurs. Si on ne sait pas communiquer, on ne peut pas transmettre notre message de prévention. C'est important de savoir parler aux entreprises.

Pouvez-vous nous décrire vos missions ? 

Je travaille sur un portefeuille d’entreprises, dans une zone géographique rentrant dans la compétence de deux médecins du travail. On peut dire que mes missions se divisent en deux origines. D'une part, il y a les demandes qui émanent de notre service, par exemple la réalisation de la fiche d'entreprise. C'est le premier pas dans l'entreprise pour connaître son activité et les risques liés. D'autre part, il y a les besoins émis par nos adhérents. Dans ce cas, ce sont les employeurs qui sollicitent le service de santé au travail pour des actions variées : aide à l'élaboration du document unique, réalisation de mesures métrologiques, renseignements sur l'affichage obligatoire, sensibilisation pour des risques professionnels... Dans tous les cas, nous avons un rôle de conseil. Nous apportons à l'entreprise les méthodes et les bonnes pratiques en matière de prévention. 

Quel est généralement votre interlocuteur au sein des entreprises ?

Nombre de nos adhérents sont des TPE et PME, donc la plupart du temps, nous échangeons en premier lieu avec l'employeur. Pour les plus grosses structures, il y a souvent un responsable hygiène et sécurité, c'est alors notre interlocuteur.

Travailler en équipe et se former en permanence

Comment s'organise votre relation avec le médecin du travail ? Et avec les autres membres de l'équipe pluridisciplinaire ?

C'est un véritable travail d'équipe où les temps d'échange sont primordiaux. Tous les deux mois, nous avons des réunions d'équipe, mais en dehors de ces rendez-vous fixes, nous nous retrouvons régulièrement. En fonction des besoins, nous nous réunissons pour partager des connaissances et des techniques, recevoir ou donner un soutien sur un problème particulier.

Le juridique prend une place importante dans votre profession, notamment avec toutes les récentes évolutions législatives... Comment appréhendez-vous cet aspect de votre métier ?

C'est une nécessité, il faut se tenir informé en permanence et se former car, au-delà du juridique pur, les techniques de prévention évoluent sans cesse. D'autant que travaillant pour un service de santé au travail interentreprises, j'ai affaire à des entreprises de secteurs très divers. Un jour, je vais rencontrer un boulanger, le lendemain, ce sera un mécanicien... C'est pour ça, qu'outre les interventions en milieu professionnel, une partie de mon métier est consacré à un temps de recherche. 

Vous vous rendez en entreprise toutes les semaines ?

Oui, par exemple, cette semaine, j'ai visité quatre entreprises. Mais je dois aussi consacrer du temps à l'administratif pour rédiger des rapports, des fiches d'entreprise, des supports de présentation pour de futures sensibilisations en entreprise...

Qu'est-ce qui vous plaît par-dessus tout dans votre métier ?

Investir un milieu professionnel toujours différent est vraiment très enrichissant. Il n'y a jamais de routine. Même si on intervient dans un secteur d'activité déjà rencontré, l'organisation de l'entreprise et sa logique de prévention seront différentes. C'est parfois difficile, car ça signifie qu'il faut apprendre en permanence, mais c'est aussi ça qui est motivant. 

Un œil extérieur essentiel pour les entreprises

Quelles difficultés pouvez-vous rencontrer parfois ?

J'avoue que parler de prévention dans des TPE ou PME se révèle quelquefois délicat. Les employeurs de ces petites structures gèrent déjà beaucoup de choses et ils n'ont pas toujours le temps d'entendre notre discours. À nous de revenir vers eux pour les convaincre. Le défi est de parvenir à leur faire comprendre l'intérêt pour leurs salariés et pour l'économie de leur entreprise de mieux prévenir les risques professionnels : moins d'absentéisme, de turn-over, une réduction des accidents de travail... Notre mission s'effectue sur le long terme. Petit à petit, les messages passent. 

Arriver à faire passer ce message de prévention, c'est finalement votre objectif premier ?

Oui, vraiment. Parfois, je me rends dans une entreprise pour réaliser une fiche d'entreprise. Et c'est véritablement satisfaisant de constater que quelques jours plus tard, cette même entreprise nous recontacte pour bénéficier, par exemple, d'une sensibilisation de ses salariés sur un risque particulier, car à la suite de notre passage et de notre discours, elle a pris conscience de l'importance de la prévention. 

Les entreprises ont besoin de cet œil extérieur pour comprendre les enjeux de la prévention ?

Oui, surtout les TPE et les PME. Souvent quand on va les voir, dans un premier temps, les employeurs nous disent qu'il n'y a pas vraiment de risques professionnels chez eux. En réalité, ils n'ont pas conscience de certains risques car c'est leur quotidien. Mais quand on commence à les accompagner, qu'on leur montre qu'ils utilisent des produits comportant des pictogrammes de danger, ou des machines avec des risques de coupures, ils réalisent que la prévention est nécessaire. Et ça justifie pleinement notre rôle.

Crédit photo : Moodboard/123RF.com

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